Maud TABACHNIK pour son dernier roman « Les Faisceaux de la peur » (City éditions).

Entretien avec Maud TABACHNIK pour son dernier roman, « Les Faisceaux de la peur » (City éditions).

Une émission enregistrée le 28 mars 2022, à Dijon, au Grand Hôtel de la Cloche, alors que l’écrivaine était l’invitée du Club des Ecrivains de Bourgogne.

Pour écouter l’émission :

 

Florence 1937. Judith Livi, 17 ans, pourrait presque couler une adolescence heureuse, entre ses parents, son frère Michael, et son amie Francesca. Hélas, 15 ans après la Marche sur Rome, le Duce mène une politique de plus en plus défavorable aux Juifs. Les miliciens de Mussolini commencent à faire régner la peur. Jeune femme au tempérament rebelle, le monde s’effondre lorsqu’un homme est froidement assassiné sous ses yeux par les fascistes, dans l’indifférence la plus totale.

Les pères fondateurs de l’Italie étaient philosémites. Mais l’Italie calque sa politique antisémite sur celle du chancelier Hitler. La famille Livi n’est pas épargnée : Samuel, ébéniste, père de l’héroïne est licencié sans motif valable. Le jeune fils de 15 ans est exclu de son club de football, et Judith est refusée en 2e année de droit à la faculté de Florence. La boutique de la mère de Judith est vandalisée par des groupes fascistes. Rumeurs et inquiétudes. Où va mener la politique de Mussolini ?

Démocratie sûre et protectrice, la France reste pour cette famille juive non pratiquante une terre d’accueil fiable. N’a t-elle pas, en 1936, élu un gouvernement de Front populaire dirigé par Léon Blum, et qui a accordé des congés payés aux travailleurs ? « Ils étaient fiers que ce soit un Juif qui ait fait progresser ce pays » (p. 46).La famille Livi s’installe à Paris et découvre un pays divisé, avec de fortes tensions entre groupes politiques qui s’affrontent violemment dans les rues de la capitale (« Tous ces Français qui n’aiment rien tant que se taper dessus et qui  râlent sans arrêt« ). Lors d’une rixe boulevard Saint Michel, Judith, « utopiste qui n’a pas peur et prête à se bagarrer » est protégée par un « fasciste sympathique », Thierry de Sainte-Foix, Croix de feu et fils de diplomate. Son oncle, Paul Marchandeau est d’ailleurs ministre de la Justice du Gouvernement en place, et auteur d’un décret-loi punissant les auteurs de diffamation ou d’injures commise envers une personne ou un groupe en raison de sa race ou d’une religion, et qui auraient pour but d’inciter à la haine entre les citoyens. Il va ensuite lui faire découvrir des amis italiens. C’est au cours de ces soirées, boulevard du Montparnasse, que notre jeune Italienne fait la connaissance de Sofia, galeriste rue Jacob, et d’Hannah Arendt, philosophe qui a fui les persécutions nazies, et qui lui explique le sens de son engagement au Bureau social sioniste qui s’occupe d’envoyer des jeunes gens vivre en Palestine sous mandat britannique.

Le dernier roman de Maud TABACHNIK restitue l’ambiance de l’Europe de la fin des années 30, aux portes d’une nouvelle guerre inévitable. « Nous dansons sur un volcan pire que le Vésuve » (Paul Reynaud). Le livre évoque aussi l’antisémitisme à la française auquel adhérèrent des intellectuels : Céline, Châteaubriant (Goncourt 1911), Rebatet, héritiers d’Édouard Drumont, Charles Maurras ou Léon Daudet.

L’auteure ressuscite le Paris de l’époque avec ses métiers disparus (tel le vendeur de glace, à la criée), ses magasins, loisirs de l’époque et sa vie culturelle (cinéma, littérature et chansons). Judith ne croise-t-elle pas Sartre et son Castor en pleine discussion au Café de Flore ?

MAUD TABACHNIK est l’auteure d’une quarantaine de polars devenus cultes, notamment « Le Cinquième jour » et « Le Festin de l’araignée ». Ses héros sont souvent des survivants, la vengeance et la justice étant au cœur de ses intrigues. Avec « Les Faisceaux de la peur« , elle signe une magnifique fresque historique, sans doute la plus personnelle de ses œuvres. Une suite est prévue.

 

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