Renata ADA-RUATA, pour « Battista revenait au printemps » (Ed. de l’aube).

Entretien avec Renata ADA-RUATA pour son dernier roman, « Battista revenait au printemps » (Ed. de l’aube, oct. 2014)

Tito (Battista) et Neto partagent une même tendresse pour Ghitta, leur grand-mère. Un même attachement à leur village, perdu dans les montagnes du Piémont italien. Une même admiration pour le maître d’école, qui n’a de cesse de les voir s’ouvrir au monde. De mêmes émois amoureux avec la fantasque Angiolina. Et un même travail saisonnier, qui les emmène chaque année avec leurs aînés dans la vallée alors que l’Histoire gronde, sous la montée du fascisme dans une Italie divisée.

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Le point de départ à l’écriture de ce roman est d’aborder le thème de la transmission d’un métier manuel. L’auteur avait initialement choisi l’horlogerie et le Jura, pour ensuite se fixer sur les travailleurs de toutes les Alpes qui, partis en automne, partaient gagner un peu d’argent et traversaient les frontières (pour se rendre en France ou en Suisse) et revenaient au printemps au milieu de leurs familles. Dans le roman, ce sont les quatre premières saisons du jeune Battista (12 ans) qui sont racontées. Dans la première saison, il marche dans la plaine du Pô, dans la seconde il traverse les Alpes pour se rendre en Suisse (Genève, Montreux), dans la troisième, il est en Ligurie avant de venir en France ( lors de la quatrième saison). En arrière-fond, l’irrésistible montée du fascisme qui menace une Italie qui se transforme.

Battista revenait au printemps

Deux figures admirables dans ce roman d’apprentissage : la grand-mère Ghitta et l’instituteur, qui transmettent leur amour de la langue et de la culture écrite. En exergue au livre, une citation de Jean-Jacques Rousseau (Émile ou De l’éducation) : « Vivre, ce n’est pas respirer, c’est agir; c’est faire usage de nos organes, de nos sens, de nos facultés, de toutes les parties de nous-mêmes, qui nous donnent le sentiment de notre existence.« 

Ce très beau roman nous fait vivre les déplacements saisonniers des paysans italiens et nous plonge au côté du jeune Battista dans un « monde puissant et poisseux », loin de la « légèreté de l’enfance […] ». Le livre engage une réflexion sur la transmission d’aptitudes manuelles et artisanales et souligne qu’ « […] avoir de la sensibilité, ce n'{est} pas une faiblesse mais une force. »

Le roman engage une réflexion sur la langue, les mots, la culture écrite et orale. Titto (Battista) aime le feu, les fers rougis, les métaux et l’électricité, mais il est également attiré par l’écriture, un désir qu’il vit comme « inavouable, interdit ». Écrire ? « Des « manies de beau monsieur » qu’encourage le maître d’école ou qu’illustre le poète Francesco, l’homme aux fleurs.

Nous assistons à la mort d’un monde au profit d’un monde plus industrialisé et plus technique qui verra grossir les rangs d’un prolétariat ouvrier au détriment de petits métiers condamnés à disparaître.

Après avoir appris à endurer et à travailler comme les autres, le jeune héros s’établira en France, où il travaillera sur les toits, à Paris ou à Lyon.

Renata ADA-RUATA, née en 1949 en Italie, a suivi ses parents italiens venus travailler en France. Son premier roman, « Elle voulait voir la mer » a été publié en 1985 par Maurice Nadeau, et a obtenu le prix Populiste l’année suivante. « Elle voulait voir la mer » a été adapté à la radio pour France Culture. Elle a exercé plusieurs métiers et pris des cours du soir, avant de devenir enseignante. Aujourd’hui à la retraite, elle vit et travaille en France et dans les montagnes en Italie.

Icône Renata ADA-RUATA

L’entretien a été enregistré à Tonnerre (Yonne), le 7 juin 2015 .

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